Les fintechs au centre des préoccupations européennes
Réunies à Paris, les acteurs de ce nouveau secteur en pleine expansion ont eu la possibilité d'échanger sur différents sujets, allant de la réglementation à l'avenir stratégique des acteurs établis.
Les fintechs, ces entreprises qui proposent des services financiers technologiques telles que les plateformes de crowdlending ou de crowdfunding immobilier- étaient réunies au cœur de Paris cette semaine, avec le Paris Fintech Forum édition 2018. Bon nombre de sujets ont été abordés au cours de ces deux jours, tant au niveau des stratégies que les fintechs pourraient poursuivre que de l'avenir réglementaire en Europe ou encore de l'avenir des cryptomonnaies et autres évolutions technologiques applicables à la finance.
Les banques toujours en retard
Ainsi, l'un des sujets important et intéressant lors de ce type de rencontre reste l'échange d'expérience entre les différents acteurs du secteur. Un premier constat s'impose : le retard des banques traditionnelles sur les fintechs. Là encore, des grands noms étaient présents comme Société Générale ou BNP Paribas. Et lors d'un débat entre Frédéric Oudéa, le président de la SG et Jay Sidhu, CEO de BankMobile, les visions semblent bien différentes. En effet, alors que pour le président de BankMobile, les clients n'ont désormais plus besoin de conseillers bancaires, Frédéric Oudéa insistait sur la nécessité d'avoir un interlocuteur réel, notamment pour la gestion de fortune. Autre point de divergence, l'implication des banques dans le développement des technologies, Société Générale avouant être en retard en la matière, contrairement aux banques américaines qui accompagnent les fintechs de plus en plus.
Deuxième constat : les fintechs anglosaxonnes ont une longueur d'avance sur les fintechs francophones. La plupart des fintechs présentes, que ce soit des néobanques comme Revolut ou N26 ou des plateformes de prêts participatif comme Prodigy Finance qui organise des prêts pour les étudiants, sont présents dans plusieurs pays (120 pour Prodigy). De son coté, malgré la réussite de son modèle, Younited Credit, qui fait du crédit participatif aux particuliers, est présent en France, en Italie et en Espagne. Pourquoi une telle différence ? la réglementation européenne est en retard sur l'harmonisation des agréments, chaque pays devant faire l'objet d'un agrément particulier. A l'inverse, les néobanques bénéficient de la directive sur les moyens de paiements et les entités étrangères peuvent disposer de passeports européens a priori.
Un avenir plutôt dans le vert pour le crowdlending
Troisième constat : les stratégies restent centrées sur le produit d'origine de la fintech. Ainsi, interrogées sur les prochaines années, les plateformes de financement participatifs, et notamment du crowdlending, parient sur une montée en puissance de leur modèle. Mais face à cela, l'un des points noirs reste le financement de cette montée en puissance, les levées de fonds n'étant pas si facile qu'il y parait. Autre point de stratégie à venir, la croissance géographique qui reste un défi pour les plateformes européennes.
Dernier constat : dans une activité comme le prêt participatif, les plateformes concernées n'ont pas peur de la remontée des taux. En effet, les taux d'intérêt étant historiquement bas, ils ne peuvent que remonter ces prochaines années. Pour certains, le fait d'avoir lancé leur activité au plus bas de la croissance économique et en pleine crise, leur permet de croire en l'efficacité du modèle même avec des taux en hausse. Et sauf à avoir une augmentation brutale des taux, il est fort à parier en effet que les plateformes de crowdlending s'adapteront à la nouvelle donne.
L'Europe en recherche d'un consensus
Enfin, lors de ces grands débats sectoriels, les politiques sont souvent invités à venir échanger sur leur vision des choses et leurs initiatives. Lors de la première journée, étaient ainsi réunis autour de la table, le ministre des Finances Français, Bruno Le Maire ; le ministre des Finances Belge, Johan Van Overtveldt ; le ministre des Finances luxembourgeois, Pierre Gramegna et le ministre des Finances de Lituanie, Vilius Šapoka. Chacun a exposé les points sur lesquels ils ont progressé, comme par exemple en Belgique le coinvestissement entre public et privé pour lancer les start-up, ou en France avec la baisse des taxes.
Et même si tous ont défendu l'idée d'une harmonisation au sein de l'Europe, et de profiter du Brexit qui devrait redistribuer les cartes pour l'installation des fintechs, chacun des pays a pour l'instant ses propres règles. Et certains comme la Lituanie apparaissent comme plus souples, avec un processus d'agrément très rapide, une plateforme commune avec la Banque centrale ou encore un cadre fiscal avantageux pour les fintechs. Il est donc temps pour l'Europe de trouver une voix commune dans le domaine des fintechs et de travailler à harmoniser toutes les règles fiscales et institutionnelles.